Une salle de cours, un vendredi après-midi, à l’heure où les autres étudient … quatre élèves, un professeur et un metteur en scène.
Nous ne sommes pas dans une école de théâtre mais dans un CFA parisien, le CFA des Métiers de la Viande, dans le 12ème arrondissement. Et ces jeunes apprentis se préparent à monter sur scène à l’occasion de la 5ème édition des Apprentiscènes, qui se tiendra du 30 mars au 8 avril 2011 à l’Espace Pierre Cardin, dans le 8ème arrondissement de Paris.
Cet évènement accueillera cette année 650 apprentis, dans tous les secteurs d’activités, qui auront, pour chaque groupe, 3 minutes pour présenter au public un sketch ou une saynète de leur création.
Retour sur nos 4 apprentis bouchers. Alexandre, Alexis, Martin et Jonathan sont tous dans la même classe ; ils sont pré-apprentis car ils n’ont pas encore atteint les 16 ans, âge légal pour l’entrée en apprentissage. Dans leur classe de 12 élèves, 7 ont accepté de participer à l’aventure, à l’initiative de leur professeur de français.
Ils sont épaulés et dirigés par Christine Farré, metteur en scène qui s’est investie depuis 2006 dans les Apprentiscènes. Il semble que les adultes n’aient pas eu grand mal à motiver ces garçons, dont deux avaient déjà une expérience du théâtre.
Ils assurent ne pas avoir le trac, ils ne subissent aucune pression, ils sont sûrs de se trouver en finale le 8 avril, comme leurs prédécesseurs dans le même CFA, vainqueurs l’an dernier.
Ils ont choisi le sujet de leur saynète avec Christine Farré, qui a elle-même rédigé le scénario.
Ils ont voulu parler de boucherie, en jouant sur les mots, en faisant saliver les spectateurs, en parlant de morceaux de viande aux noms oubliés et poétiques… Car le défi est de taille : ils n’ont que 3 minutes pour faire preuve de leur talent ; le texte autant que le jeu des comédiens doit impressionner le jury.
Les ateliers ont été lancés en décembre et les apprentis ont eu droit à 12 heures de formation, pour préparer leur pièce. 12 heures, pour être prêt à monter sur scène et jouer devant pas moins de 600 personnes !
Jonathan le premier prend la parole, pour présenter ses trois camarades. Expérimenté, il a la voix assurée et le ton déjà bien marqué. A sa suite, les trois garçons se lancent, chacun se fondant dans leur rôle.
Il leur reste encore quelques heures pour peaufiner leur jeu, revoir une dernière fois leur texte… Christine Farré est admirative : « Ils ont progressé d’une façon incroyable depuis les premières répétitions, ils parlent mieux, ils ont appris à placer leur voix, ils sont rentrés dans leur personnages.
Je suis très fière d’eux ! Et je suis satisfaite de leur offrir une expérience à laquelle ils n’étaient pas forcément destinés. »
Il faut dire qu’elle y met du cœur, Christine Farré, elle ne ménage pas ses efforts. Tout entière dans le physique, elle joue pour eux les répliques importantes, marquant le trait, expliquant les pensées du personnage, soulignant les placements de corps, encourageant, exagérant, mimant.
A peine terminée, la pièce est reprise, relancée, rejouée et sans relâche, laissant fuser quelques blagues, les quatre comédiens se remettent en scène.
Le 31 mars, ils se présenteront vêtus de leur tenue professionnelle. Si Jonathan assure qu’il n’aura pas du tout le trac, Alexis espère que ses proches ne se moqueront pas de lui ; pour sûr, il fera rire : son personnage de naïf est irrésistible ! Martin refuse d’ajouter quelques jeux de scène en arguant « Non, il y aura mon cousin dans la salle, pas question de battre des ailes, de quoi j’aurais l’air moi ? »
Tous les quatre sont d’accord pour dire que cette aventure les aura soudés. « Sans les bonnes relations entre nous, on n’aurait pas réussi ; et puis, l’ambiance est vraiment bonne, on s’amuse. C’est mieux que d’être en cours ! ».
Qu’ils soient ou non en finale le 8 avril, ces garçons auront, en tous cas gagné leur pari et vécu une expérience humaine qu’ils ne seront pas près d’oublier.