La guerre des 35 heures aura bien lieu. On peut même dire qu'elle fait rage, alors même que les différentes figures clefs du parti du gouvernement s'apostrophent et se combattent par micros et médias interposés.
Recrut se propose de remonter le fil de cette tragédie en quatre actes, dont le dénouement prononcera la survie ou la mise à mort de cette figure emblématique de la gauche française.
Lors de ses voeux aux acteurs économiques, le Président François Hollande a déclaré vouloir laisser à chaque entreprise le soin de « fixer les modalités d'organisation du temps de travail, sans remettre en cause la durée légale, en permettant par exemple de fixer le taux de majoration ou le nombre d'heures supplémentaires, ou de moduler davantage le temps de travail au-delà même de l'année».
Les représentants syndicaux sont scandalisés : il s'agit ni plus ni moins d'une remise en cause des 35h.
Lors du Sommet économique mondial, le Ministre de l'Economie confirme les craintes de ces derniers.
"Si vous pouvez négocier des accords majoritaires au niveau de l'entreprise pour n'avoir presque aucune surcompensation, cela veut dire que vous pouvez créer plus de flexibilité."
En imaginant des heures supplémentaires majorées d'à peine 1 % (voire moins), E. Macron imagine l'abolition "de facto" des 35 heures.
La Maire de Paris s'est agacée des propos d'E. Macron, qualifiant le questionnement sur les 35 heures de "débat du XXième siècle" complètement démodé.
«On ne va pas faire en sorte que les gens travaillent plus en gagnant moins ! Moi je suis pour que l'on rétribue le travail ! »
Chargée par le gouvernement de définir les "principes juridiques les plus importants", les "piliers" intouchables du Droit du Travail français, la commission Badinter a estimé qu'au-delà de la durée normale de travail "tout salarié a le droit à une compensation", réaffirmant par là la nécessité d'une majoration des heures supplémentaires.
La Ministre de Travail s'est prononcé dans le même sens, affirmant qu'il n'était pas question de descendre sous le seuil de 10 % de majoration, minimum légal aujourd'hui.
Pris a parti par une journaliste sur la dernière sortie de son Ministre de l'Economie, le Chef du Gouvernement a joué à un drôle de numéro d'équilibriste. Il a ainsi rappelé que si l'existence d'une durée légale du travail était une nécessité, le fait qu'elle soit actuellement de 35 heures était tout à fait contingente. Autrement dit, s'il est attaché à une majoration des heures supplémentaires, rien n'empêche le gouvernement de redéfinir le déclenchement de ces dernières. Il dédramatise ainsi la déclaration d'E. Macron, soulignant que la fin des 35h ne signifiait pas, en soi, la fin d'une durée du travail. Ou comment faire rentrer le Ministre rebelle dans le cadre rappelé par la Commission Badinter.
« La dérogation à cette durée légale n'est plus une transgression depuis longtemps. […] Elle est même au cœur de ce qu'est notre économie, puisque les Français travaillent en moyenne 39 heures par semaine. »