Le chiffonnier est un très vieux métier né au Moyen-âge, et qui a connu son apogée au XIXème siècle avec le développement de l’industrie du papier.
Un chiffonnier était une personne dont le métier consistait à passer dans les villes et les campagnes pour racheter ou ramasser des choses usagées et les revendre à des entreprises de transformation. Il circulait seul avec une grande hotte ou avec une charrette tirée par un âne ou même un chien.
Ce métier a été exercé jusque dans les années 60 en France, date à laquelle il a disparu.
Le chiffonnier passait de maison en maison afin de collecter :
- des vieux chiffons pour les papeteries
- des peaux de lapin pour les industries de fourrure, pour la marqueterie ou pour faire la colle de peau utilisée en ébénisterie
- de la ferraille pour la métallurgie
- du papier pour la cartonnerie
- du verre
- des boîtes de conserve pour l’industrie du jouet
- des os pour la fabrication de colle, pièces de tabletterie, films photographiques…
Dans les villages de campagne, le chiffonnier collectait ces divers éléments en échange d’assiettes, poteries, verres ou mouchoirs. Il ramassait la peau de lapin essentiellement le dimanche car cet animal était dans de nombreuses familles au menu du « jour du seigneur ».
Métier difficile, celui qui l’exerçait était considéré comme un personnage inquiétant du fait qu’il était solitaire et qu’il cheminait à pied à travers la campagne. Du coup, on ne le laissait pas entrer dans la maison ; l’échange se faisait sur le pas de la porte.
Dans la capitale, la profession de chiffonnier bénéficie d’une reconnaissance des autorités de police. Réglementé dès 1828, l’ordonnance royale lui impose de porter une médaille délivrée par le Préfet de Police et d’être muni d’un petit balai pour relever les ordures, ainsi qu’une lanterne. Ce travail a une réelle utilité sociale, prémice du « tri sélectif » pratiqué aujourd‘hui.
Il faut savoir qu’on compte 30 000 chiffonniers en 1899 qui vivent de cette libre collecte, ce qui classe l’activité comme la septième parmi la liste des industries d’exportation selon le ministère du commerce de l’époque. D’ailleurs, la récolte s’avère fructueuse puisqu’elle représente environ 36 millions de francs par an. Chiffre exact de ce qui se ramasse en fait de détritus et de chiffons dans la capitale française.
Concernant les surnoms donnés aux chiffonniers, on pouvait les désigner par « Pilhaouer » en Bretagne. Passant de ferme en ferme, ils criaient « Tamm pihoù, tamm ! » (Morceaux de chiffons, morceaux !).
Dans d’autres régions, ils passaient au cri de « chiiiiiiiiffonnier ! chiiiiiiiiffonnier ! » ou « Peaux de lapin, Peaux de lapin ! ». Le chiffonnier pouvait être également nommé « Biffin » dans les campagnes, mot dérivant de « Biffe » = chiffon, objet sans valeur. À Paris, il prenait parfois le surnom de « Chiftire ».
Ce métier a disparu en France à partir du début des années 70, avec l’apparition de la grande distribution et le ramassage des ordures généralisé dans tous les pays d’Europe. Toutefois, il continue d’exister encore aujourd’hui dans de nombreuses régions du monde.
Dans le langage populaire, « chiffonnier » conserve un côté péjoratif quand il veut désigner une personne mal habillée, parlant souvent un langage vulgaire. Toutefois, le chiffonnier de métier, dont l’habillement était sali de par sa profession, exerçait un métier relativement lucratif et net d’impôt. Enfin, l’expression « se battre comme des chiffonniers » tire son origine de ce métier et témoigne encore de son apreté. En effet, pour un simple vieux chiffon, les hommes étaient prêts à se battre.
Pauline de Waele