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La mode en entreprise

08/04/2015

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Pouvez-vous porter ce que vous souhaitez ? Votre employeur peut-il vous infliger un carton rouge si votre sens du style n’est pas à son goût ? Parce que votre effort vestimentaire ne doit pas se limiter à l’entretien d’embauche, RECRUT joue pour vous au décrypteur de tendances en entreprise.

 

Dis-moi ce que tu portes…

Sur la question de la tenue vestimentaire, le Code du Travail est on ne peut plus clair : « Le choix des vêtements relève de la liberté individuelle du salarié ». Une liberté totale, donc ? Pas tout à fait. Il convient en effet de souligner que se vêtir n’est pas considéré comme une liberté fondamentale mais comme une liberté individuelle, c’est-à-dire pouvant faire l’objet de restrictions.

Ces dernières se doivent d’être objectives (et donc ne pas relever de la seule appréciation de l’employeur) mais surtout légitimes, c’est-à-dire justifiées par « la nature de la tâche à accomplir ». Ainsi, votre patron peut vous obliger à porter certaines protections pour des mesures de sécurité et/ou d’hygiène, notamment dans les secteurs du bâtiment et de la santé. D’autres secteurs (la restauration, les prestations haut-de-gamme, notamment) sont également très codifiés et justifient leur absence de souplesse par une image d’excellence à préserver et le contact avec la clientèle. Ces impératifs vestimentaires doivent absolument être explicites et figurer dans le contrat de travail, le règlement intérieur ou la convention collective. A noter : le temps passé à revêtir la tenue réglementaire doit être pris en compte, soit décompté du temps de travail, soit compensé financièrement.

Ne pas suivre ses directives constitue-t-il un motif de licenciement ? La loi est plus floue à ce sujet et repose sur beaucoup de cas déjà traités en justice. Si refuser de porter l’uniforme peut être considéré comme une faute grave, l’employeur est encouragé à privilégier le dialogue et se doit d’expliquer clairement en quoi certaines tenues sont incompatibles avec les missions. C’est donc moins le refus de se plier aux règles que la persistance de ce refus qui constituera un motif valable de licenciement (pour faute). Ainsi le tribunal a-t-il donné raison à une agence immobilière suite au renvoi d’un salarié qui s’obstinait à venir travailler en jogging, car cette tenue ne reflétait pas le sérieux nécessaire à la fonction et au contact avec la clientèle. Une autre limite qui donnera raison à votre employeur : la décence. Une employée a ainsi été licenciée pour avoir porté un chemisier transparent… sans soutien-gorge. De quoi troubler les collègues et donc perturber l’environnement de travail. Comme toujours, la liberté des uns s’arrêtent où commence celle des autres.

Le prestige de l’uniforme

Les entreprises technologiques de la Silicon Valley ont imposé la décontraction comme un symbole de liberté créative et d’innovation. Chez Abercrombie, la notion d’uniforme n’est même plus liée aux vêtements, mais au physique même des employés. C’est donc peu dire que la tenue de travail diffuse un message, plus ou moins explicite. On aurait donc tort de sous-estimer le pouvoir de l’uniforme, souvent détourné (Village People, imagerie érotique) et associé à des organisations rigides (armée). En effet, l’uniforme est avant tout un outil marketing qui fait de chaque employé, dans chacun de ses mouvements, un ambassadeur d’une marque. Par leur chemise marron ou leur tablier vert, les livreurs d’UPS et serveurs chez Starbucks s’inscrivent dans une culture d’entreprise et offre au client des points de repère : la confiance accordée à la marque par le client déteindra sur eux dès lors qu’ils revêtiront leur tenue de travail.

L’uniforme est donc gage de sérieux et d’expertise, un constat qui dépasse parfois les marques pour s’appliquer à la fonction : on croit d’autant plus les conclusions d’un médecin que celui-ci porte une blouse blanche, l’amende semble d’autant plus sévère qu’elle est infligée par un policier ou contrôleur reconnaissable.  A l’échelle individuelle également l’uniforme est porteur de sens, en ce qu’il permet au salarié de s’inscrire physiquement dans une équipe et de porter une culture d’entreprise égalitaire (au travail comme à l’école, l’uniforme gomme les distinctions sociales et hiérarchiques induites par la tenue vestimentaire). Dans la restauration rapide, par exemple, c’est l’attitude en cuisine et non l’habit qui vous permettra de distinguer le chef d’équipe de ses subordonnés.

Loin d’être dépassé, l’uniforme a donc encore une forte résonnance dans l’imaginaire collectif. Tant et si bien d’ailleurs que certaines des entreprises américaines que nous évoquions plus haut ont aujourd’hui fait le choix d’instaurer un « formal Friday », soit un jour dans la semaine où les employés doivent sacrifier leur liberté vestimentaire au profit du plus rigide costume-cravate.

 

L’habit ne fait pas le moine

Dans une société de l’image comme la nôtre, le look tend à peser de plus en plus dans le milieu professionnel Que ce soit par son supérieur ou sa clientèle, le salarié est scruté et il lui faut donc prendre très au sérieux cette question. D’où l’élargissement de la question de l’apparence en entreprise, qui ne se résume plus à la seule question des vêtements. Le look est considéré sous son acceptation la plus large, ce qui entraîne de nouvelles tendances. Au premier rang de celle-ci : l’explosion de la chirurgie esthétique. Sa démocratisation (+20 % d’interventions en cinq ans) a touché les hommes mûrs : chefs d’entreprise et managers quinqua ou sexagénaire font désormais appel au bistouri pour ne pas perdre en autorité ce qu’ils gagnent en rides. A l’inverse, les opticiens constatent une démocratisation des lunettes (même à correction très faible ou inexistante) comme astuce pour se vieillir et gagner en crédibilité, notamment chez les jeunes commerciaux. Il n’est d’ailleurs pas rare que le modèle porté diffère entre les sphères intime et professionnelle ! Plus globalement, les UV sont désormais monnaie courante chez les hommes comme chez les femmes de tout âge : adieu la grise mine, bonjour le look dynamique et vitaminé !

Si elle est le plus souvent implicite et alimentée par les salariés eux-mêmes, cette pression sur l’apparence entraîne parfois quelques dérives chez les employeurs. En témoigne ce scandale provoqué en décembre dernier par la diffusion d’une brochure auprès des employés de la SNCF. Cette dernière, et notamment son chapitre « Les astuces pour finir en beauté », dictait le maquillage, parfum et bijoux pour mesdames, la beauté des mains et l’entretien de la pilosité de monsieur. Devant les hauts cris provoqués par ces préconisations, l’entreprise a depuis retiré la plaquette concernée.

 

Pour aller plus loin, retrouvez notre interview d'une personal shoppeuse !

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