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L'alternance peut-elle fonder un grand projet de société ?

01/03/2002

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Refonder l’alternance : tel est le projet des fondateurs du SNACFA, Syndicat National Autonome des Centres de Formation en Alternance, créé il y a quelques mois.

Le Syndicat National Autonome des Centres de Formation en Alternance (SNACFA), a été constitué en novembre par quatre directeurs de centres parisiens.

Il compte aujourd’hui une quarantaine de centres de formation membres, réunis autour d’une ambition : donner au système de l’alternance les lettres de noblesse qu’il mérite.

Reconnaître le rôle des organismes de formation pour la présélection des jeunes

Le nouveau syndicat a une vision très ambitieuse de l’alternance : il veut qu’elle devienne la base d’un grand projet de société.

Pour cela il faudrait que les autorités reconnaissent la réelle mission des centres de formation. Le système actuel interdit aux centres de formation de présélectionner les jeunes, et on leur reproche de gagner leur vie en faisant leur métier.

Or, comme le souligne Sandrine Forestier, Vice-Présidente du syndicat : « En théorie, le système de l’alternance devrait se dérouler ainsi : une entreprise emploie un jeune et souhaite le qualifier.

Elle connaît le principe de l’alternance, et décide d’opter pour un contrat de qualification; pour cela elle contacte un organisme de formation.

En réalité, c’est souvent suite à un appel d’un centre de formation que l’entreprise décide d’embaucher un jeune en alternance; le centre va être chargé d’analyser le poste à pourvoir dans l’entreprise, de définir le profil du jeune, de le trouver, d’organiser le rendez-vous de présentation en entreprise.

Une fois le jeune sélectionné, le centre va continuer sa mission en montant de A à Z le contrat avec l’entreprise d’accueil, en relation avec l’OPCA et la DDTE.

S’il fallait attendre que l’entreprise fasse elle-même le recrutement des jeunes en alternance, en publiant une annonce, triant les CV et procédant à des entretiens, le système serait totalement en échec !

Les employeurs attendent ce travail des organismes de formation. Cela explique que le contrat de qualification adulte n’ait pas été un succès, alors qu’il existe dans les lois : c’est un contrat que les instituts de formation n’ont pas commercialisé en raison des règles d’éligibilité trop restrictives. Un tel dispositif ne pourrait fonctionner qu’avec la collaboration des centres de formation. 

Les trois métiers des centres de formation

D’après le SNACFA, la réussite de l’alternance est donc en grande partie l’œuvre des centres de formation qui en font la promotion auprès des jeunes et des entreprises, qui assurent le recrutement des jeunes, leur placement professionnel, et leur bonne intégration chez l’employeur.

Or la réussite du contrat de qualification est réelle : le syndicat estime que 550 000 emplois ont été créés et pourvus grâce à ce mode de formation depuis 1983, date de sa mise en place.

Il insiste notamment sur l’importance de l’alternance pour les PME « qui n’ont pas les moyens de former en interne et ont beaucoup profité du système de l’alternance. ».

Reprocher aujourd’hui aux centres de formation de jouer le rôle qu’ils ont peu à peu occupé n’est donc pas logique.

Le SNACFA va même plus loin, puisqu’il demande la rémunération par les OPCA des missions accomplies par les centres de formation en terme « d’information des entreprises d’accueil, d’analyse du besoin par l’établissement, » ainsi que de leurs actions d’information, de pré-insertion et d’accompagnement des jeunes.

« Mettre fin à l’hypocrisie »

Résumant cette thématique, Reinhald Lamacque, Prési-dent du SNACFA, souhaite « dénoncer une hypocrisie : la réussite du contrat n’est obtenue que grâce à l’implication des organismes de formation, car ce sont eux qui recrutent les jeunes, qui donnent réalité au futur contrat. »

M. Levy-Valensi, Membre du comité directeur du syndicat, poursuit cette réflexion en insistant sur le besoin de faire reconnaître les trois métiers des instituts de formation : nous avons une fonction commerciale, lorsque nous définissons en amont avec les entreprises leurs besoins et que nous attirons les candidats en faisant de la publicité pour nos formations ; ensuite, nous intervenons dans le recrutement des jeunes, que nous présélectionnons et que nous présentons aux entreprises ; et enfin, le cœur de notre travail est l’enseignement et l’ingénierie pédagogique, puisque nous créons de nouvelles méthodes de formation.

Charte de qualité

Afin de reconnaître et d’encadrer toutes les activités des centres de formation, le SNACFA désire aussi travailler à la rédaction d’une « charte de qualité ».

Actuellement, les instituts de formation ne sont pas tous sous contrôle de l’Etat. Tout organisme de formation peut prétendre proposer des contrats de qualification. Des abus existent, qui décrédibilisent le reste de la profession.

Pour faire face à cette dérive, le SNACFA souhaite que la charte de qualité soit adoptée par l’ensemble des acteurs du contrat de qualification : jeunes, organismes de formation, DDTE, OPCA, entreprises, organisations professionnelles…

Il préconise en outre la « création d’un bureau de contrôle de l’efficacité du contrat de qualification et de l’action des centres de formation. »

 Tous les jeunes en alternance !

Prendre acte de la réalité de l’alternance et mettre des règles au point ne suffirait cependant pas à faire de l’alternance la base d’un nouveau projet de société, d’après le SNACFA.

Le syndicat veut agir pour que ce mode de formation plébiscité à la fois par les jeunes et par les entreprises soit revalorisé.

A côté de la formation initiale et de la formation continue, l’alternance doit devenir une «troisième voie pour l’éducation, revendique Maryse Delarue, membre du comité directeur et responsable du projet pédagogique au SNACFA.

L’alternance est un outil pédagogique d’une formidable modernité pour une société en transformation permanente dans des environnements complexes et instables. (…)

C’est un défi pour le système éducatif, qui doit réfléchir sur les relations à construire avec les entreprises, sur les conditions indispensables à mettre en œuvre pour que le travail soit formateur, sur la façon d’articuler les savoirs.

(…) Exigeons que tous les jeunes puissent bénéficier d’au moins une année en alternance avant leur sortie du système éducatif, du CAP au titre d’ingénieur, dans des formations diplômantes ou des formations qualifiantes, » revendique-t-elle.

La crise financière de l’alternance

La création du SNACFA a cependant répondu avant tout à une problématique très actuelle : la crise financière que traverse le système de l’alternance.

En octobre 2001 le système du contrat de qualification s’est trouvé à court de liquidités. Certains OPCA ont annoncé qu’ils cessaient de prendre en compte les nouveaux contrats de formation qui leur étaient présentés.

Normalement, les OPCA (Organismes Paritaires Collecteurs Agréés) recueil-lent les taxes payées par les entreprises au titre de la formation et les reversent ensuite aux centres de formation, pour financer les cours demandés par les entreprises.

La raison du soudain refus de certains dossiers est simple : les OPCA ne pouvaient plus les financer.

L’AGEFAL (Association de gestion du fonds des formations en alternance), organisme chargé d’éviter tout problème de trésorerie des OPCA en jouant vis-à-vis d’eux un rôle d’assureur, était dans l’impossibilité de remplir sa fonction.

Ses caisses, un temps excédentaires, ont été ponctionnées par le gouvernement plusieurs années de suite.

Un rapport sénatorial présenté en novembre 2001 par Mme Annick Bocandé, fait état de 361 millions d’euros (2,37 milliards de francs) prélevés sur l’AGEFAL par l’Etat entre 1997 et 2000.

« L’argent de l’AGEFAL a servi à financer les 35 heures ! »

Lorsqu’en octobre 2001 l’AGEFAL ne peut plus re-financer les OPCA déficitaires, ceux-ci se voient donc contraints de refuser des demandes de prise en charge par les instituts de formation.

D’après Sylvain Levy-Valensi, qui cite des sources issues de certains OPCA, « cet argent a servi à financer les 35 heures. Or c’étaient des fonds privés. »

Une situation qui a créé des drames à la fois dans des centres de formation, privés de leurs ressources, et chez les jeunes dont les demandes ont soudain été déboutées.

« Plusieurs centaines de centres formation sont aujourd’hui en cessation de paiement. 33 000 jeunes en cinq mois [entre le mois d’octobre 2001 et celui de février 2002, ndlr] se sont vu refuser l’accès à l’emploi en alternance », estime M. Levy-Valensi.

Obtenir une prise en charge à 10 de l’heure

Une seconde source de tension financière a surgi ces dernières semaines. Certains OPCA ont pris la décision soudaine et sans concertation de baisser le taux de remboursement des heures de cours, ainsi que leur nombre.

Une formation qui auparavant était payée par l’OPCA 9,15  (60 F) de l’heure, l’est désormais au taux de 7,6  (50 F).

Le SNACFA est très clair sur ce point : « nous avons pour objectif de revenir immédiatement à la prise en charge par les OPCA de 1100 heures de formation à 9,15 (60 F), puis nous agirons pour que cette prise en charge évolue vers 1200 heures à 10  ».

D’autre part, les dirigeants du syndicat insistent sur la nécessaire réduction du délai entre le moment où les centres de formation engagent des frais pour faire fonctionner leurs structures, et la date à laquelle les OPCA leur versent des fonds. Ce décalage est aujourd’hui de six à huit mois.

Au cours de rencontres régulières et individuelles avec les OPCA, le syndicat a pour objectif d’obtenir un « acompte à la signature du contrat puis des échéances trimestrielles » pour les centres de formation.

Simplification administrative

Une des revendications principales du nouveau syndicat n’est cependant pas d’ordre financier : il s’agit de « simplifier et d’harmoniser les procédures et exigences administratives des OPCA et des DDTE », en permettant par exemple le contact direct entre les organismes de formation et la DDTE (Direction départementale du travail et de l’emploi, chargée du traitement administratif des dossiers).

D’autre part, les revendications du SNACFA en matière administrative touchent la fameuse « circulaire Barrot » dont l’interprétation varie d’une DDTE à l’autre, entraînant parfois le refus des dossiers de formation en contrat de qualification de jeunes disposant d’un Bac Profession-nel, et parfois au contraire leur acceptation.

Il faudrait donc, d’après le syndicat, une « harmonisation et une précision sur l’interprétation des textes pour les conditions d’éligibilité au contrat de qualification. »

L’existence actuelle de « différences de traitement d’une demande d’acceptation d’un contrat de qualification entre les villes, les départements, les régions » est anormale, comme le signale M. Lamacque.

Des recours efficaces

Dans ce cadre, les centres de formation ont besoin d’être informés, notamment en ce qui concerne les recours possibles contre les décisions administratives.

Le SNACFA veille à les appuyer de manière très pratique en mettant des outils à leur disposition. Ainsi, la cellule « SOS conseils » est un service destiné à tous les centres, adhérents ou non.

Elle les aide à rédiger leurs recours pour les dossiers qui ont été refusés par les partenaires de l’alternance, OPCA et DDTE.

Un recours qui porte semble-t-il très souvent ses fruits, lorsqu’il est bien effectué. Par ailleurs, le nouveau syndicat vient de lancer un site internet (www.snacfa.org) encore partiellement en construction, sur lequel les adhérents trouveront des modèles de conventions de formation, de contrats de travail, et une bourse d’échange de compétences ou de locaux.

Les non-adhérents, quant à eux, pourront par exemple y découvrir et télécharger des textes importants sur l’alternance.

Autant d’outils destinés à rassembler les centres de formation : « nous avons été trop longtemps désunis, il faut créer l'idée d'appartenance, donner du sens à notre mouvement et devenir une vraie force de proposition innovante » suggère M. Lamacque.

 

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