L’association NQT (voir encadré) vient de dévoiler une enquête* sur l’insertion professionnelle des jeunes en 2017. De quoi brosser le portrait d’une génération aussi motivée que résignée et qui, surtout, ne croit plus à l’idéal républicain de la méritocratie.
Trouver un bon job (c’est-à-dire cohérent avec son niveau d’étude et ses aspirations) ne dépend pas de soi ; telle est la principale conclusion de l’enquête commandée par NQT à l’institut de sondages IPSOS au sujet de l’insertion professionnelle des moins de trente ans. Ces derniers considèrent que la recette d’une recherche d’emploi réussie repose sur trois ingrédients, plutôt inattendus : le goût du travail (44 %), les relations (40 %) et le courage (39 %). Les diplômes et la créativité ne viennent que bien après (26 % et 12 % respectivement), dessinant un marché de l’emploi ressenti comme plus favorables aux « pistonnés » qu’aux compétents.
Les relations permettent en effet de faire sauter un verrou de poids, qui est celui des entreprises ; 38 % des jeunes interrogés estiment en effet que ces dernières ne font pas assez confiance aux jeunes candidats. Une impression difficilement démontrable, et que contredisent même les 42 % des répondants qui disent avoir décroché leur premier emploi par candidature spontanée (contre un quart par les « réseaux relationnels »).
L’autre enseignement, tragique, de cette étude est que la persistance d’un fort déterminisme social : de l’obtention d’un diplôme à celle d’un CDI, l’origine modeste poursuit celui ou celle qui en est issu. Plus d’un tiers des répondants estiment même que faire de longues études ne protègent pas les plus défavorisés de la galère lorsque ces derniers recherchent un emploi. Ceux-ci sont d’ailleurs les moins optimistes quant à leur avenir (68 %, contre 74 % des jeunes issus d’un milieu favorisé).
Globalement, le scepticisme domine sur le rôle de l'ascenseur social dans la France actuelle : seule une petite moitié croit encore en la méritocratie, et même moins de 50 % dans les milieux les plus modestes. Cette angoisse a une autre conséquence directe, plus pernicieuse : les jeunes défavorisés sont plus enclins à sous-employer leurs capacités. En effet, 51 % d'entre eux se disent prêts à garder un emploi stable sans s'y épanouir, contre un tiers seulement des diplômés favorisés.
L’association NQT (Nos Quartiers ont du Talent) s’efforce depuis plus de dix ans à compenser le déterminisme social par un système de parrainage qui met en relation des actifs expérimentés avec des diplômés méritants issus de quartiers prioritaires. Il s’agit, selon les mots de son co-fondateur Yazid Chir, de « mettre la lumière sur des jeunes qui devraient être des modèles pour leur pairs ».
Forte d’un bilan de plus de 40 000 jeunes accompagnés en une décennie, NQT entend aujourd’hui amplifier et accélérer le mouvement en visant les 100 000 jeunes accompagnés sur les cinq prochaines années. Une ambition qu’elle espère soutenue par le gouvernement (avec lequel l’association discute actuellement) et dont le feu vert sera donné lors d’un grand rassemblement au 104, le 15 novembre prochain. |
* Enquête réalisée par IPSOS sur un échantillon de 1000 personnes âgées de 18 à 30 ans, entre le 13 et le 16 octobre 2017.