Le 23 juin 2016, le Royaume-Uni chamboulait l’Europe en votant à 51,9 % sa sortie de l’Union européenne. Si les arguments avancés par les électeurs portaient avant tout sur des questions économiques et sécuritaires, cette décision n’est pas sans susciter de vives inquiétudes pour les travailleurs et étudiants expatriés (qui représentent 5,5 % des élèves des universités anglaises.
Passage en revue des différents scénarios possibles pour les futurs étudiants Erasmus.
L’Angleterre fut souvent considérée comme un acteur tempéré de l’Union européenne, elle qui ne fait partie ni de la zone euro ni de l’espace Schengen de libre circulation des biens et des personnes. Concernant le programme Erasmus, en revanche, son poids est absolument indéniable. Selon les derniers chiffres disponibles, le Royaume-Uni est la destination préférée des étudiants (avec environ 20 % des départs), devant l’Espagne et l’Allemagne. Malgré l’absence de l’euro et un coût de la vie élevé, les terres de la Reine séduisent en raison du prestige international de ses universités, mais surtout de la langue anglaise –atout désormais indispensable sur un CV de jeune actif.
L’attrait est tel que le Royaume-Uni présente la balance la plus déséquilibrée du programme : pour 15 000 étudiants anglais qui partent, le pays en reçoit 27 400 (chiffres de 2013). Autrement dit, l’Europe aime plus l’Angleterre que celle-ci n’aime l’Europe, y compris sur la question Erasmus. En cette même année 2013, 6 800 étudiants français étudiaient en Grande-Bretagne, tandis alors que nous n’accueillions que 4 500 de nos voisins. En tout, près de 14 000 jeunes français ont traversé la Manche entre 2012 et 2014 (un chiffre qui, soulignons-le, place le pays derrière l’Espagne chez les étudiants hexagonaux).
Lorsque les urnes ont parlé, elles ont provoqué une onde de choc dans toute l’Union européenne. Le flot de questions sur les conséquences à prévoir fut ininterrompu. Pourtant, pour Erasmus comme pour tout le reste, la réponse est (pour le moment) simple : rien ne bouge. Aucune conséquence immédiate ne se fera sentir pour la simple raison que le processus de sortie de l’Union n’est pas encore enclenché, et que celui-ci prendra plusieurs années. De fait, le Royaume-Uni s’est engagé à rester dans le programme Erasmus jusqu’en 2020. Jusqu’à cette date, les élèves se verront offrir les mêmes destinations qu’aujourd’hui.
C’est après que les choses se corsent, notamment pour le programme qui –avec le retrait d’un de ses principaux contributeurs– verra son budget amputé alors même que ses membres réfléchissaient à une expansion prochaine. Mais les principales victimes seront bien entendus les jeunes européens, qui se verront sans doute dans l’impossibilité d’étudier outre-Manche sans les conditions avantageuses découlant du cadre Erasmus. En effet, une fois la sortie du programme actée, les étudiants européens seront considérés comme des élèves internationaux à part entière, contraints de se doter d’un visa et de s’acquitter de frais de scolarité souvent prohibitifs (en moyenne 10 000 € par an). De plus, ils ne pourront plus jouir des bourses et de la reconnaissance systématique de leur formation à l’étranger dans leur pays d’origine.
« Il y a des aspects de la coopération européenne, comme le programme Erasmus […], dans lesquels ce serait une bonne idée de rester. » La phrase est de Boris Johnson, pourtant chef de file du Brexit. Preuve que l’Angleterre y réfléchira sans doute à deux fois avant de quitter le programme Erasmus. En effet, si les étudiants européens pourront se tourner vers les pays du nord pour parfaire leur anglais, le Royaume-Uni perdra son rayonnement international dans le domaine de l’éducation, qui repose essentiellement sur son ouverture aux professeurs, chercheurs et élèves du monde entier. A moins de devenir partenaire moyennant une contrepartie financière, comme la Turquie.