Le smartphone dans une main, le biberon dans l’autre, c’est ainsi que s’imaginent de plus en plus de femmes qui profitent de leur grossesse pour lancer leur activité. Entre bébé et business, elles refusent de choisir et rejettent une entreprise qui ne veut plus d’elles ou ne correspond plus à leurs attentes. Elles, ce sont les mompreneurs.
Sans surprise, le phénomène des « mompreneurs » (parfois orthographié mumpreneurs, voire mampreneurs en français) nous vient des Etats-Unis, où il s’est développé dès la fin des années 90. Sur la terre natale du « self-made man » et des « baby showers », elles sont aujourd’hui cinq millions et jouissent de leurs propres émissions radio, télévisées et revues spécialisées.
Le phénomène repose sur des éléments bien définis: de nouvelles mères qui, par refus du statut de « femmes au foyer », se créent leur propre activité. Aux Etats-Unis, on les appelle aussi les WAHM, work at home mothers (mères travaillant à la maison). Ayant identifié un besoin chez elles ou leur enfant auquel l’offre existante ne répond pas, elles trouvent une solution inédite qu’elles finissent par commercialiser. C’est le cas d’Anne-Laure Constanza, figure phare de mompreneurs françaises, qui lance en 2006 Envie de Fraises après avoir constaté la pauvreté de l’offre vestimentaire pour les femmes enceintes. Parce que l’entreprenariat était jusqu’à très récemment majoritairement masculin, le terrain de la natalité reste encore largement inexploré. Le potentiel d’innovation pour ce nouveau type d’autoentrepreneurs est donc immense, d’autant plus que l’existence d’une clientèle est garantie par le besoin même ressenti par la mompreneur.
Reste qu’une bonne moitié des entreprises ainsi créés disparaitront avant d’atteindre leur troisième anniversaire, preuve que certaines voient trop grand en s’imaginant gérer de front –et seules– enfant, maison et entreprise. Mais plus encore, ce taux d’échec prouve que l’on ne s’improvise pas entrepreneur et qu’une bonne idée ne suffit pas. Parmi les principaux écueils se trouvent celui du financement. Désireuses de ne pas exposer leur foyer nouvellement formé, les mompreneurs limitent les risques et rares sont les investissements initiaux supérieurs à 10 000 €. Pourtant, pour des raisons de logistique, la plupart privilégie le format du e-commerce, peu gourmand quand il est informel mais dont le coût augmente bien vite s’il l’on prétend atteindre une large audience et sécuriser les paiements. A cela s’ajoute la difficulté à se rémunérer : en moyenne, un entrepreneur met deux ans avant de pouvoir se payer. Le conjoint est donc à consulter car son soutien moral et financier paraît incontournable.
La seconde difficulté frappe tous les entrepreneurs et détermine bien souvent le succès de l’entreprise naissante : la constitution d’un réseau, propre à offrir conseils et contacts. Sur ce point, le moins que l’on puisse dire est que les mompreneurs se serrent les coudes. Associations et forums fleurissent sur internet, qui organisent des rencontres et remises de prix. Sur la principale plateforme française (mompreneurs.forumpro.org), elles partagent leurs expériences avec une conviction, celle que le mouvement n’en est encore qu’à ses prémices et continuera à grandir tant que les entreprises feront de la parentalité un frein à la carrière.